un vertige puis le silence. (r)

Les tigres étaient pris d’assaut. De même que les ours et les lions mais ça n’avait pas d’importance, Olivia passait devant sans même les voir. Elle n’aimait pas les animaux, du moins pas vraiment. Ils sentent mauvais et la plupart du temps ne servent absolument à rien. Pour autant, elle avait une passion peu commune pour les tortues et les voir évoluer dans leur faux état naturel l’apaisait toujours un peu, l’aidait à mieux réfléchir. Elle venait toujours ici pour essayer de mettre les choses au clair dans sa petite tête blonde ce qui ne manquait pas de faire rire son entourage. C’est donc devant les tortues qu’elle s’arrêta. Pas besoin de se tordre le cou pour les dévisager, personne ne tenait jamais vraiment à les voir. Les enfants criaient que c’était nul, qu’il voulaient quelque chose d’un peu plus exotiques, les adultes voulaient simplement laisser leurs enfants quelque part et espéraient qu’il ne rentre jamais chez eux et les autres et bien, elle ne préférait pas savoir ce qu’ils faisaient ici. Comme d’habitude, elle prit place sur un banc qui faisait face au petit étang et s’assit en tailleur, son sac à ses côtés. Elle avait de la chance, il ne pleuvait pas et elle pourrait rester aussi longtemps qu’elle le souhaitait en ce samedi après-midi. Les employés avaient depuis longtemps cessés d’essayer de la comprendre quant aux passants, elle s’en fichait royalement. C’est donc ici, dans son petit coin de paradis qu’elle se permit d’y penser. Elle avait mit sous clé cette idée depuis déjà deux semaines, elle ne voulait, ne pouvait se résoudre à envisager les choses ainsi. Lorsque son père le lui avait dit, elle avait clairement cru à une farce. Tromper sa mère ? Abandonner l’enfant ? Non, ça ne pouvait être lui. Mais si, il était bel et bien le géniteur de Carter et elle était la seule à le savoir. Bon sang, elle détestait les secrets. Elle était du genre à tout balancer d’un coup ne pouvant pas tenir en place mais celui-ci, celui-ci ce n’était pas n’importe quoi. C’était sa vie, celle de ses sœurs, de sa mère, de Carter qui étaient en jeu. Tout pouvait changer avec une révélation pareille et elle ne savait pas si elle pouvait supporter d’en être la conséquence directe. Elle qui parlait au moins une fois par jour à Carter avait été très discrète cette semaine. Olivia ne pouvait le regarder en face et faire comme si de rien n’était. Mais lui dire ? Pour quoi faire ? Et surtout comment ? Et le souvenir de son corps nu contre le sien remontait à la surface assez régulièrement, lui rappelant qu’elle avait couché avec son demi-frère. C’était… Affreux, tout simplement. Elle aurait pu dire que c’était son burrito de midi qui n’était pas passé mais à force de ressasser toutes ses choses, elle finit par en avoir la nausée et posa les jambes à terre pour y coincer sa tête entre. Inspirer. Expirer. Inspirer. Expirer. Des pieds apparurent dans son champ de vision mais ce fut son parfum qui lui permit d’identifier son compagnon. Cela et le fait que seuls lui et Léo bravaient sa solitude pour venir la chercher ici et l’arrachait au monde des songes. C’était encore trop tôt. Elle n’avait rien décidé, ne pouvait rien dire. Elle hésitait à se relever, à le regarder dans les yeux. Comment expliquer son silence ? Olivia décida de ne pas relever la tête, elle avait clairement besoin de cette position mais ouvrit tout de même la bouche. « A moins que les tortues se chaussent désormais je crois que ce qu’il y a ici ne t’intéressera pas. »